À propos du nucléaire

1 / Le développement du nucléaire en France

La France est aujourd’hui à la tête d’un parc de 58 réacteurs à eau pressurisée représentant un remarquable gisement d’énergie : c’est le résultat d’une politique énergétique cohérente, s’inscrivant dans le long terme. Rappelons qu’en 1970 la dépendance énergétique de la France était proche de 80 % ; la conséquence en fut l’envolée de la facture pétrolière au moment du premier choc pétrolier, passant de 14,4 milliards de francs en 1973 à 162 milliards de francs en 1981.

1-1 / Le programme nucléaire, un bilan positif en France

Le gouvernement français, mesurant tous les aspects politiques, a décidé en mars 1974 l’accélération du programme nucléaire français, afin de redonner à la France les moyens de son indépendance énergétique. 20 ans après, nous pouvons mesurer les résultats au travers de quatre constats :

Premier constat : grâce au nucléaire, le taux d’indépendance énergétique français s’est stabilisé depuis 1990 autour de 50% (50,1% en 1997).

Il aura fallu, simultanément, que la part du nucléaire dans la production d’électricité atteigne 78% et que celle de l’électricité dans la consommation finale d’énergie monte à 41%. La réussite a donc nécessité la convergence des efforts et des capacités industrielles de ceux qui ont construit le nucléaire et d’un intérêt accru pour les usages de l’électricité de la part des clients d’Electricité de France.

Deuxième constat : le coût de notre électricité est l’un des plus bas et l’un des plus stables en Europe.

Entre 1986 et 1996 les prix de vente aux clients domestiques et industriels ont baissé de 19%, en valeur moyenne et en francs constants. Une baisse supplémentaire de 14% engagée sur la période 1997/2000 diminuera la facture d’électricité des clients d’EDF de 56 milliards de francs. Le coût du kWh produit par le parc nucléaire existant set inférieur à celui des meilleures filières thermiques.

Troisième constat : ces résultats ont été obtenus dans le respect des critères de sûreté et des normes de radioprotection.

Les pouvoirs publics ont mis en place dans le cadre réglementaire, une organisation des contrôles et une autorité de sûreté indépendante. Les constructeurs et exploitants des installations nucléaires ont respecté l’ensemble des prescriptions destinées à garantir la population et les travailleurs contre les risques d’accidents d’origine nucléaire et ceux liés aux rayonnements. De même, sont maîtrisés les rejets dans l’environnement qui restent en dessous des seuils autorisés.

Certes, des écarts ont pu être constatés, mais ils ont toujours été corrigés et n’ont jamais eu la moindre conséquence sur la santé des personnes ni d’effets néfastes sur l’environnement.

Quatrième constat : le développement du programme électronucléaire français a permis au pays de protéger la qualité de son environnement.

Avec 57 réacteurs électronucléaires et 2000 usines hydroélectriques, la France couvre 90% de ses besoins en électricité sans produire de CO2, ni aucun rejet de produits soufrés ou nitrés.

Alors que l’industrie électrique produit aujourd’hui 40% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, on prend conscience de plus en plus dans les grandes rencontres internationales du rôle bénéfique et sans doute incontournable de l’énergie nucléaire dans les cent ans qui viennent.

Cette question n’était pas à l’origine des choix de 1974, mais on ne peut que constater la baisse spectaculaire et bienvenue des émissions polluantes du parc de production de l’électricité en France : – 22% en France, + 14% dans le monde.

1-2 / Des performances du parc nucléaire en hausse

Fin 1997, le parc nucléaire comprenait 57 réacteurs à eau pressurisée : 34 de la série des 900 MWe, 20 de la série des 1300 MWe et 3 du type 1450 MWe (du palier N4), donc une puissance installée de 61500 MWe. On attend, en 1999, le couplage sur le réseau d’une quatrième et dernière tranche du palier des 1450 Mwe.

La même année, 376 milliards de kWh ont été produits par des moyens nucléaires par des moyens nucléaires, c’est à dire 78% de la production électrique française totale et 83% de la production d’EDF. L’augmentation de la production résulte de l’effet cumulé de l’augmentation de la puissance installée, mais aussi de la très bonne disponibilité des centrales, supérieure d’environ 10% aux prévisions : 82,6% en 1996 et 97 ; 85% recherchés en l’an 2000.

Les besoins du pays étant couverts, EDF peut exporter de l’électricité dont la valeur ajoutée est presque totalement produite en France.

1-2 / Une facture énergétique en baisse

En 1981, la facture énergétique de la France avait atteint 162 milliards de francs, ce qui représente 300 milliards de francs en valeur 1997.

La tendance s’est inversée à partir de 1981 grâce à la diminution du prix du pétrole, mais surtout grâce au recours croissant à l’électricité nucléaire produite en France.

Malgré la croissance de la consommation, le solde du commerce extérieur en matière d’énergie était revenu en 1996 à son niveau d’avant le premier choc pétrolier de 1973 (en francs constants).

En 1997, la France a dépensé 85,6 milliards de francs pour son énergie, l’essentiel étant lié aux importations de pétrole. Le recours à l’électricité nucléaire lui permet d’économiser 50 milliards de francs en devises chaque année.

1-4 / Les facteurs du succès

La décision de 1974 n’a pas été prise en terrain vierge : la recherche et développement, l’enseignement, l’expérience industrielle, le rôle réglementaire de l’autorité publique s’étaient aguerris grâce à la réalisation de nombreux réacteurs expérimentaux ou de puissance, en France ou en coopération avec d’autres pays.

Trois moteurs ont sans doute assuré le succès de l’amplification du programme français dans les années 70 et 80.

  • D’abord la volonté politique de faire. Volonté qui ne s’est jamais démentie au gré des gouvernements successifs et qui n’est pas sans relation avec l’attitude plutôt favorable de l’opinion publique française. Son corollaire était la mise en place d’une autorité de sûreté indépendante, d’une réglementation et d’un système de contrôle cohérents, propre à l’activité nucléaire.
  • Ensuite le choix par l’exploitant – Electricité de France – d’un standard technique unique, celui des réacteurs à eau pressurisée développés aux Etats-Unis, puis en France et réalisés selon des paliers de puissances croissantes, en longues séries identiques : 34 tranches de 900 Mwe, 20 tranches de 1300 Mwe et 4 de 1450 Mwe.
  • Et enfin une industrie possédant toutes les capacités humaines et techniques qui se sont agrégées autour d’un fabricant unique des chaudières nucléaires – FRAMATOME – et d’une société unique, héritière de l’expérience du CEA, pour tout le cycle du combustible – COGEMA.

Cet ensemble très cohérent était soutenu par les activités de recherche, de développement et de formation aux techniques nucléaires déjà engagées par le CEA depuis plus de 20 années.

Il est intéressant de montrer comment les principaux acteurs qui viennent d’être cités ont su favoriser l’adaptation du tissu industriel existant par ailleurs aux nécessités du programme nucléaire.

2 / Les pouvoirs publics et la sécurité nucléaire – Contrôle et réglementation

2-1 / Sécurité nucléaire et radioprotection

La sécurité nucléaire est l’ensemble des dispositions permettant d’assurer la protection des personnes et des biens contre les dangers et nuisances qui seraient la conséquence du fonctionnement d’installations nucléaires ou de manipulation de substances radioactives.

Ses objectifs requièrent l’intervention des départements ministériels de la défense, de l’environnement, de l’industrie, de l’intérieur et de la santé dont les actions sont coordonnées au sein du Comité Interministériel de la Sécurité Nucléaire qui réunit périodiquement les ministres concernés sous la présidence du Premier Ministre.

Parmi les problèmes que la sécurité nucléaire doit traiter, la sûreté nucléaire comprend l’ensemble des dispositions prises – de la conception à l’arrêt définitif des installations nucléaires – pour prévenir les accidents et en limiter les effets. Ce sont les ministres chargés de l’environnement et de l’industrie qui sont responsables, au sein des pouvoirs publics, des questions de sûreté.

La protection contre les rayons ionisants relève des ministres chargés de la santé et du travail. C’est l’autre grand domaine de la sécurité nucléaire où sont mises en œuvre les mesures techniques permettant de limiter l’exposition des travailleurs et du public aux rayonnements lors du fonctionnement normal des installations et d’optimiser la gestion des déchets et des effluents radioactifs.

2-2/Rôles et responsabilités des pouvoirs publics et de l’exploitant

Les pouvoirs publics ont élaboré un système d’organisation et de réglementation spécifique à la sûreté nucléaire dont l’option fondamentale repose sur la responsabilité technique de l’exploitant, contrôlée par une Autorité de sûreté indépendante. Les pouvoirs publics veillent à ce que cette responsabilité soit pleinement assumée dans le respect des prescriptions réglementaires.

L’articulation des rôles respectifs des pouvoirs publics et de l’exploitant peut se résumer ainsi :

  • les pouvoirs publics définissent des objectifs de sûreté ;
  • l’exploitant propose des modalités techniques pour les atteindre, et les justifie ;
  • les pouvoirs publics s’assurent de l’adéquation de ces modalités aux objectifs fixés ;
  • l’exploitant met en œuvre les dispositions approuvées ;
  • les pouvoirs publics vérifient la bonne mise en œuvre de celles-ci.

2-3/Organisation du contrôle de la sûreté nucléaire

Les larges pouvoirs dévolus à l’Autorité de sûreté impliquent, d’une part, qu’elle soit elle-même contrôlée, et qu’elle recoure, d’autre part, au maximum d’avis compétents émanant d’organismes consultatifs et d’appuis techniques.

L’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques

Cet office, créé en 1983, est une délégation parlementaire chargée d’informer le Parlement des conséquences de choix à caractère scientifique et technologique. Il réalise des missions d’évaluation, par exemple des systèmes de décision et de contrôle. Ces missions portent également sur la sûreté des installations nucléaires, la sécurité et l’information du public ainsi que sur la gestion des déchets radioactifs.

Organismes consultatifs et de conseil

Le Conseil Supérieur de la Sûreté et de l’Information Nucléaire (CSSIN)

Le CSSIN, créé en 1973, est un conseil de “sages” de haut niveau, choisis en raison de leurs compétences scientifiques, techniques, économiques ou sociales, ainsi qu’en matière d’information et de communication. Il adresse aux ministres en charge de l’industrie et de l’environnement toute recommandation qu’il juge utile dans le domaine de la sûreté nucléaire.

La Commission Interministérielle des Installations Nucléaires de Base (CIINB)

La CIINB, créée par décret en 1963, est consultée par les ministres chargés de l’environnement et de l’industrie sur les demandes d’autorisation de création, ou de modification des installations nucléaires de base et sur l’élaboration et l’application de la réglementation relatives à ces installations.

Autorité de Sûreté

La Direction de la Sûreté des Installations Nucléaires (DSIN)

La DSIN relève des ministres chargés de l’environnement et de l’industrie. Elle est responsable de la définition et de la mise en œuvre de la politique relative à la sûreté des installations nucléaires : elle est l’expression de l’Autorité de sûreté en France.

Ses principales missions sont les suivantes :

  • élaborer et suivre l’application de la réglementation technique ;
  • mener les procédures d’autorisation relatives aux installations nucléaires ;
  • organiser la surveillance de ces installations par des inspections ;
  • préparer la mise en place d’une organisation en cas d’incident ou d’accident ;
  • organiser l’information du public et des médias sur la sûreté nucléaire ;
  • participer à des organismes internationaux et développer des relations bilatérales.

Les Directions Régionales de l’Industrie de la Recherche et de l’Environnement (DRIRE)

Vu l’importance du programme nucléaire français, il est apparu nécessaire de déconcentrer la surveillance des installations vers les DRIRE, afin de bénéficier de l’efficacité apportée par la proximité géographique.

Après le Bureau de Contrôle des Chaudières Nucléaires (BCCN), spécialement chargé de l’application de la réglementation des appareils sous pression au sein de la DRIRE Bourgogne, 8 autres Divisions des Installations Nucléaires (DIN) ont été créées.

Les missions actuelles des DRIRE en matière de sûreté nucléaire sont les suivantes :

L’inspection, l’approbation des programmes d’arrêt des centrales, l’instruction des dérogations aux règles générales d’exploitation, le traitement des incidents, le contrôle des appareils à pression, la réglementation des installations classées pour la protection de l’environnement, la réglementation du travail, les relations avec les autorités locales.

L’effectif de l’Autorité de sûreté (DSIN et quatorze DRIRE) s’élève à 190 personnes.

Appuis techniques

Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire (IPSN)

Conformément aux dispositions de l’arrêté modifié du 2 novembre 1976, l’IPSN, institut du Commissariat à l’Energie Atomique a pour mission générale de réaliser les études, recherches et travaux de protection et de sûreté nucléaire qui lui sont confiés par les départements ministériels et organismes intéressés. A ce titre, l’IPSN fournit un appui technique direct à la DSIN en matière de sûreté nucléaire.

La part la plus importante des prestations de l’IPSN pour la DSIN est réalisée par son Département d’Evaluation de la Sûreté (DES) qui mène les analyses des dispositions présentées par les exploitants d’installations nucléaires. Ces analyses sont, soit présentées devant le Groupe permanent chargé des réacteurs pour les affaires les plus importantes, soit transmises directement à la DSIN pour les autres affaires.

Groupes Permanents

Une décision du Ministre de l’Industrie, en date du 27 mars 1973, a été instituée auprès de la DSIN des groupes permanents formés d’experts et de représentants de l’administration, chargés d’étudier les problèmes techniques que posent, en matière de sûreté, la création, la mise en service, le fonctionnement et l’arrêt des installations nucléaires. Un de ces groupes est chargé des réacteurs nucléaires (GPR).

Commission Centrale des Appareils à Pression (CCAP)

La CCAP regroupe des représentants des diverses professions et des spécialistes des techniques utilisées dans la construction et le contrôle des appareils à pression. Le Ministère de l’industrie s’appuie sur cette commission pour la préparation de textes réglementaires et l’octroi de dérogations éventuelles à ceux-ci. Pour les chaudières nucléaires, la CCAP s’appuie sur la Section Permanente Nucléaire (SPN) qu’elle a constituée en son sein. La SPN donne son avis sur les questions relatives aux enceintes, appareils et circuits sous pression intéressant directement la sûreté nucléaire.

2-4 / La réglementation

Les installations nucléaires sont soumises à deux types de réglementation :

  • Les procédures d’autorisation ;
  • Les règles techniques.

Les procédures d’autorisation

Le décret du 11 décembre 1963 qui réglemente les installations nucléaires prévoit notamment une procédure d’autorisation de création suivie d’une série d’autorisations délivrées lors des principales étapes marquant la vie des ces installations : du chargement du combustible jusqu’au démantèlement final.

Bien avant l’autorisation de création, l’exploitant dialogue avec l’autorité de sûreté sur le choix du site et les options de sûreté et fait ensuite sa demande d’autorisation de création accompagnée d’un rapport préliminaire de sûreté.

L’instruction de cette demande comporte une enquête publique et un examen technique.

L’autorisation de chargement du combustible, les diverses étapes menant à la montée en puissance à 100%, ainsi que la mise en service définitive de l’installation est soumises à des autorisations données par les ministres chargés de l’environnement et de l’industrie.

Les autorisations de rejets d’effluents liquides et gazeux et de prélèvements d’eau

Le fonctionnement normal des installations nucléaires produit des effluents radioactifs. Leur rejet dans l’environnement est soumis à des conditions strictes, précisées par une autorisation réglementaire, afin de protéger le public et les milieux naturels. Cette autorisation concerne les effluents radioactifs liquides et les effluents radioactifs gazeux. Elle tient compte de la radioactivité ainsi que des caractéristiques chimiques de ces deux types d’effluents.

Les règles techniques

Une série hiérarchisée de textes réglementaires fixe des règles techniques en matière de sûreté nucléaire. Ils forment une pyramide à trois niveaux.

Les lois, décrets et arrêtés, élaborés par les pouvoirs publics, coiffent l’ensemble du dispositif réglementaire, avec des textes très généraux qui n’entrent pas dans les détails techniques.

Les règles ayant trait à la sûreté ainsi que la conception et la construction portent au contraire sur des sujets très précis qu’elles traitent dans le détail. Elles ont une forme juridique plus souple.

La réglementation technique générale

Au sommet de l’édifice est définie la réglementation technique générale, notamment sur deux sujets majeurs : les appareils à pression et la qualité.

Aux appareils à pression, s’applique l’arrêté du 26 février 1974 relatif au circuit primaire principal des réacteurs à eau sous pression. Cet arrêté couvre la conception, la construction et l’exploitation de ce circuit. Le BCCN et les DRIRE sont chargés de veiller à son application.

Pour la qualité, l’arrêté du 10 août 1984 en précise les règles générales d’assurance et d’organisation de la qualité que doivent suivre les exploitants d’installations nucléaires.

Les règles fondamentales de sûreté

Sur divers sujets techniques, la DSIN émet des Règles Fondamentales de Sûreté (RFS). Ce sont des recommandations qui définissent, dans divers domaines techniques, des objectifs de sûreté et décrivent des pratiques qu’elle juge satisfaisantes pour respecter ceux-ci.

Il ne s’agit pas de textes réglementaires proprement dits. Un exploitant peut ne pas suivre les dispositions d’une règle fondamentale de sûreté s’il prouve que les moyens alternatifs qu’il propose permettent d’atteindre les objectifs qu’elle fixe.

Cette forme de texte, par sa souplesse, permet de faire évoluer les dispositions techniques en fonction du progrès des techniques et des connaissances. Il existe une quarantaine de RFS.

Les codes et normes élaborés par l’industrie nucléaire française

La pratique réglementaire française en matière de sûreté nucléaire exige que l’exploitant écrive et présente l’ensemble des règles, codes et normes qu’il met en œuvre lors de la conception, de la réalisation et de la mise en service des équipements importants pour la sûreté. Ces codes et normes sont appelés “Règles de Conception et de Construction” (RCC). L’Association Française pour les règles de conception et de construction des matériels des Chaudières ElectroNucléaires (AFCEN), à laquelle participent EDF, FRAMATOME, NOVATOME, a rédigé et publié 6 recueils de ces règles dont elle assure en permanence la gestion. L’élaboration de ces documents ne relève pas de la compétence de la DSIN. Mais celle-ci procède à l’examen détaillé des RCC et de leurs révisions successives.

Sauf exclusions explicites, toutes les réglementations générales s’appliquent, y compris les normes AFNOR. L’action du BNEN, Bureau de Normalisation d’Equipements Nucléaires, s’exerce hors des matériels objet des RCC. Constitué par l’AFCEN, le CEA, COGEMA, EDF, FRAMATOME, le GIIN et SGN, il agit en liaison avec l’AFNOR et l’AFCEN.

Un de ces objectifs est de proposer une normalisation au niveau européen.

2-5 / La Radioprotection

Cadre réglementaire

La réglementation en matière de radioprotection forme un ensemble cohérent :

  • de normes de base relatives à la protection sanitaire qui concernent l’irradiation des professionnels et des populations ainsi que les rejets liquides et gazeux de substances radioactives ;
  • du contrôle du strict respect de ces normes, mis en œuvre par l’exploitant et les ministères chargés de la santé et du travail.

La Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR) émet, depuis les années 50, un ensemble de recommandations qui fixent les principes et les bases scientifiques d’un système de normes de radioprotection. A partir de ces recommandations, sont élaborées par EURATOM les “normes de base” qui sont ensuite transposées dans le droit français par décrets et arrêtés.

Le contrôle réglementaire de la radioprotection en France

L’Office de Protection contre les Rayonnements Ionisants (OPRI)

L’OPRI est un service technique des ministères chargés de la santé et du travail chargé des missions d’expertise, de surveillance et de contrôle propres à assurer la protection de la population contre les rayonnements ionisants. Il participe à la préparation de lois, règlements, accords internationaux relatifs à la radioprotection.

Outre ses missions relatives à l’hygiène publique et professionnelle, l’OPRI contrôle en permanence la conformité aux règlements des rejets des installations nucléaires et de leur environnement.

2-6 / Organisation en cas de crise

Fixée par les directives du Premier Ministre, l’organisation, en cas d’incident ou d’accident, concerne à la fois la sûreté nucléaire, la radioprotection, l’ordre public et la sécurité civile.

Elle comporte très logiquement deux niveaux, local et national.

L’organisation au niveau local est confiée à deux responsables opérationnels : le préfet et l’exploitant. Le préfet est chargé de la sécurité et de l’ordre public ; il assure l’information des populations et des élus, et déclenche, s’il y a lieu, le Plan Particulier d’Intervention (PPI).

Celui-ci doit permettre d’assurer la sécurité du public et apporter l’aide nécessaire à la centrale.

L’exploitant, de son côté, est responsable de la situation sur le site. Il déclenche le Plan d’Urgence Interne (PUI) qui a pour but de maintenir ou de ramener l’installation dans un état sûr.

L’organisation au niveau national fait intervenir les départements ministériels concernés. Leur tâche est de faciliter l’action du préfet en lui fournissant informations et avis. Ils sont coordonnés par le secrétariat général du Comité Interministériel de la Sécurité Nucléaire.

2-7 / Les déchets nucléaires

Nature, conditionnement et quantités

Les déchets nucléaires sont caractérisés par leur durée de vie et leur activité :

  • déchets à vie courte de faible et moyenne activité ;
  • déchets de moyenne activité contenant des émetteurs à vie longue ;
  • déchets de haute activité avec des quantités notables de déchets à vie longue.

La production annuelle de déchets produits par le programme électronucléaire français est de :

  • 35000 m3 environ de déchets de la première catégorie ci-dessus, conditionnés en fûts de ciment pour un stockage en surface ;
  • 4000 mde déchets de la deuxième catégorie, conditionnés en fûts de ciment ou de bitume ;
  • 180 m3 de déchets de la troisième catégorie qui sont “vitrifiés”.

Il est sans doute utile de situer le poids des déchets produits en France par an et par habitant :

  • déchets nucléaires conditionnés : 1,5 kg dont environ 10 g de produits de fission vitrifiés ;
  • déchets domestiques : 500 kg environ ;
  • déchets industriels : 2000kg environ.

Il est intéressant de noter que les déchets nucléaires représentent 0,06% par rapport à l’ensemble des déchets, alors que l’électricité est produite en France à plus de 75% par l’énergie nucléaire.

Bien que d’une faible proportion relative, il convient d’ajouter aux déchets de l’industrie électronucléaire ceux produits par les activités médicales et par certaines activités de l’industrie et de la recherche.

Des études sont en cours pour réduire encore le volume des déchets par fusion et compactage.

Pour les déchets de haute activité, essentiellement composés d’actinides provenant du retraitement des combustibles usés, des études d’incinérations sont en cours au CEA, dans des accélérateurs et surtout dans des réacteurs à neutrons rapides. Ces derniers sont en effet capables de transmuter des actinides en produits stables non radioactifs.

Super Phénix avait été proposé pour un tel objectif qui pourra être poursuivi avec un efficacité moindre dans Phénix. Si la faisabilité scientifique d’un tel projet est certaine, il reste à en évaluer tous les aspects techniques et le coût économique.

Le tableau qui vient d’être dressé correspond à l’option française du retraitement des combustibles usés. Il est à noter que, dans une option de non-retraitement, les assemblages de combustibles usés sont considérés comme des déchets de haute activité, ce qui en augmenterait le volume.

Les opérations de retraitement, exécutées pour le compte des clients étrangers, donnent lieu à des déchets qui sont, après un entreposage temporaire sur le site de l’usine de retraitement, renvoyés aux clients dans leurs pays respectifs. La France n’a donc à se préoccuper que du sort de ses propres déchets.

Rôle de l’ANDRA

En France, la responsabilité de la gestion des déchets est confiée l’Agence Nationale pour la gestion des Déchets RAdioactifs (ANDRA). Cette agence, placée sous la responsabilité du ministre chargé de l’industrie, a notamment en charge l’exploitation des centres de stockage des déchets de basse et moyenne activité ainsi que la coordination des programmes recherchant une solution définitive pour les déchets de haute activité à vie longue.

Loi du 30 décembre 1991

La loi du 30.12.1991 fixe 3 objectifs en ce qui concerne les déchets de très haute activité :

  • rechercher des solutions permettant la séparation et la transmutation des éléments radioactifs à vie longue ;
  • étudier des possibilités de stockages réversibles et irréversibles dans des formations géologiques profondes ;
  • étudier des procédés de conditionnement et d’entreposage de longue durée en surface.

Cette loi a également créé une Commission Nationale d’Evaluation (CNE), composée de 12 personnalités. Elle est chargée de suivre l’état d’avancement des recherches et de produire un rapport annuel au Gouvernement.

Pour le stockage de déchets de haute activité et à vie longue, l’ANDRA a évalué des localisations dans des couches géologiques en profondeur et de très haute stabilité.

Trois sites de laboratoire souterrain de stockage ont été retenus pour expérimentation (la décision sur le choix du site de stockage ne devant pas intervenir avant 2006) :

  • le site “Est” en Meuse et Haute-Marne en formation argileuse ;
  • le site du “Gard”, également en formation argileuse ;
  • le site de “la Vienne”, en formation granitique.

Les rapports de demande d’autorisation d’installation et d’exploitation ont été présentés à la DSIN et aux autorités locales à la mi-mai 96. L’information du public est organisée par l’ANDRA sur les trois sites, un consensus étant nécessaire avec les élus et les populations aux alentours.

Il est probable que deux sites seront retenus et les travaux de fonçage des puits devraient débuter en 1998.

3 / L’exploitant : Electricité de France

Electricité de France (EDF) est un établissement public créé par la loi du 8 avril 1946, qui nationalisait – en même temps que les industries gazières – les entreprises ayant leur activité principale dans “la production, le transport, la distribution, l’importation et l’exportation d’électricité”.

Depuis sa création et jusqu’en 1997, la consommation d’énergie électrique a été multipliée par 17, passant de 24,3 à 415 TWh (ou milliards de kilowattheures). Dans le même temps, la puissance des moyens de production est passée de 9,5 à 110 GW (millions de kilowatts), dont 102 GW sont exploités par EDF. Aujourd’hui, l’entreprise produit 93% et distribue 95% de l’énergie électrique consommée en France.

L’effectif de l’entreprise est 118 500 personnes, dont 42 300 appartiennent à la Direction Production Transport qui exploite le parc nucléaire avec 19 000 personnes ; la Direction de l’Equipement, avec un effectif de 4 400 personnes, ayant en charge la construction des centrales.

3-1 / La réalisation du programme nucléaire

Convaincue de l’intérêt à terme de l’énergie nucléaire, EDF a suivi, dès le départ, les progrès de son application à la production d’énergie électrique. Après avoir développé, avec le concours du CEA, la filière uranium naturel/graphite/gaz carbonique (5 tranches France, 1 tranche Espagne), l’entreprise s’est associée à la Belgique dans la construction et l’exploitation de la Centrale de Chooz (département des Ardennes), puis dans la construction de la première tranche de Tihange (province de Liège). Ces deux unités de la filière à uranium enrichi et eau ordinaire pressurisée préludaient l’emploi généralisé de cette filière dite “REP” (Réacteur a Eau Pressurisée) ou PWR en anglais.

La crise du pétrole en 1973 a conduit EDF, se conformant aux directives du Gouvernement, à amplifier considérablement son programme d’équipement nucléaire. EDF a fait le choix de tranches PWR standardisées et commandées à l’industrie en longues séries d’unités identiques en trois paliers successifs. La standardisation des modèles a évité de disperser les moyens des constructeurs et des autorités de sûreté, elle a diminué les aléas de construction et de montage grâce à l’interchangeabilité des composants. Elle répond bien aux exigences de l’assurance de la qualité, permet les évolutions et intègre facilement les leçons du retour d’expérience. Elle facilite la formation et l’entraînement du personnel d’exploitation, tant pour la maintenance des centrales que pour leur entretien.

L’industrie française s’est adaptée à la complexité et à la dimension des projets électronucléaires : EDF est seul propriétaire, maître d’œuvre, architecte industriel et exploitant ; celui-ci est par ailleurs l’interlocuteur unique de l’autorité de sûreté. FRAMATOME est seul responsable de l’étude et de la fourniture de la chaudière nucléaire et de son combustible. COGEMA est l’opérateur unique du cycle du combustible. GEC-ALSTHOM fournit les groupes turboalternateurs et les composants principaux de la salle des machines.

Les conséquences favorables de cette organisation sur les coûts et les délais sont connues.

La construction en série et la standardisation ont permis de surmonter sans dépenses excessives les incidents génériques et les maladies de jeunesse. Alors que l’on tablait au départ sur une disponibilité de 72%, celle-ci atteint 82,6% en 1996 et 97 et l’exploitant se fixe un objectif de 85% à l’horizon 2000.

Au total, ce programme a coûté environ 600 milliards de francs d’investissements, financés, pour les 2/3, par autofinancement, pour moins de 8% par dotation de l’Etat actionnaire, le reste ayant été emprunté. Avec un amortissement déjà bien engagé du parc, l’entreprise peut aborder dans de bonnes conditions l’évolution des règles européennes des marchés de l’électricité et préparer dans les meilleures conditions la génération prochaine de ses moyens de production.

3-2 / Les axes de travail pour le futur

Première priorité : le parc nucléaire en exploitation

Avec 13 ans de moyenne d’âge, le parc nucléaire français est encore récent (14 ans pour les 900 MW, 8 ans pour les 1300 MW). Il est encore susceptible d’amélioration dans tous les aspects de son exploitation, ce qui signifie : souci permanent de la sûreté, retour d’expérience, amélioration du professionnalisme des acteurs internes et externes, meilleure organisation, amélioration des résultats de dosimétrie.

En même temps, l’objectif est de maîtriser les coûts de maintenance et d’exploitation que facilite l’effet série du parc standardisé.

Ces deux actions combinées permettent au parc nucléaire actuel de conserver sa marge de compétitivité par rapport aux autres énergies, marge qui, selon les énergies, est comprise entre 10 et 30%.

Deuxième priorité : le cycle du combustible

La France a choisi de se doter des capacités industrielles permettant le retraitement et le recyclage du combustible. Le but est de réduire le volume des déchets ultimes à stocker et de mieux utiliser le potentiel énergétique contenu dans la matière nucléaire.

Les objectifs sont plus particulièrement :

  • dans l’amélioration des performances du combustible nucléaire ; comment tirer encore plus d’énergie du même barreau d’uranium ;
  • dans le développement de l’utilisation du combustible MOX (Mélanges d’OXydes d’uranium et de plutonium), dont les résultats actuels démontrent l’équivalence économique par rapport au combustible à oxyde d’uranium.

Troisième priorité : les déchets nucléaires

Comme toute activité industrielle, le nucléaire produit des résidus : identifiés, triés, traités, ils sont conditionnés selon leur nature.

L’objectif est de réduire le volume des déchets produits à la source, puis, une fois produits, à diminuer leur volume par des techniques de recyclage, compactage et incinération.

En ce qui concerne les déchets à vie longue, représentant une très faible part des déchets nucléaires produits ‘moins de 0,5%), EDF travaille dans le cadre de la loi du 30 décembre 1991, en collaboration étroite avec le CEA et l’ANDRA pour les programmes de recherche nécessaires.

Quatrième priorité : les réacteurs du futur

Les 4 dernières tranches mises en service ou en construction sont du modèle N4 de 1450 MW. Développé et mis au point par EDF et les constructeurs français, N4 tire parti de l’expérience accumulée et intègre plusieurs perfectionnements technologiques : combustible à hautes performances, générateurs de vapeur avancés, salle de commandes informatisée privilégiant le dialogue opérateur-machine, turbine Arabelle à rendement amélioré.

Le modèle REP 2000 est en préparation pour les centrales du siècle prochain. Il répondra aux exigences du cahier des charges européen (EUR) en cours d’élaboration et sera équipé d’un réacteur franco-allemand appelé EPR (European Pressurized Water Reactor), développé par EDF conjointement avec les compagnies d’électricité allemandes et les industriels Siemens, Framatome et leur filiale commune NPI.

La France a une expérience importante des réacteurs à neutrons rapides. Après l’arrêt de Super Phénix, décidé par le Gouvernement, EDF continuera de rechercher toutes les voies possibles d’économie des matières premières de l’énergie, dont l’uranium. Les réacteurs à neutrons rapides restent, à cet égard, plus qu’une hypothèse de travail, dont le redémarrage autorisé de Phénix confirme la pertinence.

3-3 / Les activités internationales d’EDF

L’activité d’EDF ne se limite pas au territoire français et l’entreprise mobilise de plus en plus la totalité de ses compétences dans des activités internationales, nucléaire compris :

  • prises de participation dans des sociétés de production ou de distribution ;
  • ventes d’électricité aux compagnies d’électricité des pays voisins, culminant à 70 TWh ;
  • assistance aux pays de l’Est pour la mise à niveau de leur personnel et de leurs centrales en matière de sûreté, ainsi que pour l’achèvement de certaines unités nucléaires ;
  • ventes de services dans tous ses domaines de compétences. Dans le domaine nucléaire, cela concerne :
  • la prospection des sites, les études de faisabilité, le projet préliminaire,
  • l’assistance au Maître d’ouvrage pour la préparation technique des appels d’offres, le dépouillement des offres et la passation des contrats aux fournisseurs principaux,
  • les études d’architecture industrielle générale de la centrale,
  • la supervision et la coordination de la construction de la centrale, des montages et des essais sur le site,
  • l’assistance à la maintenance et à la surveillance des centrales en exploitation,
  • l’assistance à l’exploitation et la formation du personnel.

Ces activités sont le plus souvent menées en coopération avec des partenaires étrangers